Classes dédoublées : la formation des petites classes devient sur mesure
À Soissons, dans l’académie d’Amiens, Philippe Culem dirige les écoles Tour-de-Ville (maternelle et élémentaire) et Mendès-France (maternelle), soit 19 classes situées en réseau d’éducation prioritaire renforcée (REP +). Depuis la rentrée 2017, les classes de CP sont dédoublées et à la rentrée 2018, ce sont celles de CE1. Soutenus par la mise en œuvre de classes flexibles et une collaboration étroite entre enseignants, les résultats sont au rendez-vous. Philippe Culem entend aller plus avant dans les nouvelles pratiques pédagogiques, en s’inspirant notamment du système éducatif québécois.
Les classes de CP et de CE1 de l’école Tour-de-Ville sont dédoublées depuis trois ans. Comment avez-vous procédé ?
Le dédoublement concerne donc sept classes – trois de CP et quatre de CE1 – qui accueillent en effet une douzaine d’élèves seulement. Immédiatement, les enseignants ont réorganisé leurs classes pour mettre en œuvre cette mesure. Ils ont d’abord retiré les meubles et les chaises en trop, ce qui a leur permis d’agrandir des coins thématiques et d’en créer de nouveaux. Dans un premier temps, ils se sont renseignés auprès de leurs collègues responsables des classes de maternelle. Cela a été une source d’inspiration pour repenser leur classe en mode « flexible ». Le mobilier a été complétement revisité : des assises variées comme de petites chaises, des ballons, des poufs et des matelas, mais aussi des tables à roulettes, facilement déplaçables, ont fait leur apparition. Les tables sont par exemple dépourvues de case en-dessous, tout le matériel pour les élèves étant centralisé dans un même endroit de la classe. Deux enseignantes de CP ont même investi le couloir qui sépare leurs classes : les enfants y travaillent par exemple sur des tablettes.
Retrouvez ici, nos fiches outils sur les différentes assises à adopter en classe.
Quels changements ces classes dédoublées et flexibles induisent-elles ?
Il faut d’abord souligner que c’est la volonté de changer leurs pratiques qui a conduit les enseignants à changer de matériel, et pas l’inverse ! Une classe flexible permet de travailler en mode classique ou en ateliers. Dans cette configuration, les élèves retrouvent les habitudes de travail qu’ils ont acquises en maternelle. Ils sont ainsi moins « perdus » en CP. Cette continuité avec la maternelle permet de préserver l’autonomie que les enfants ont développée durant leurs premières années d’école et qui est nécessaire pour leur permettre de se réaliser, de créer, d’enrichir leur vocabulaire… Contrairement aux idées reçues, la classe flexible est très organisée et requiert un fort investissement de l’enseignant, qui établit des plans de travail hebdomadaires par élève ou groupe d’élèves : les enfants ont toute la semaine pour les réaliser, dans l’ordre qu’ils veulent. Grâce à cette approche nouvelle et au nombre restreint d’élèves, les enseignants connaissent davantage et accompagnent mieux chaque enfant.
Observez-vous de meilleurs résultats chez les élèves ?
Oui mais pas uniquement du fait du dédoublement des classes. Les enseignants appliquent également de nouvelles pratiques collaboratives dans le but de faire progresser les élèves. Les évaluations nationales du début de l’année servent de base pour identifier les faiblesses des enfants et pour quantifier les objectifs à atteindre. Les enseignants réfléchissent alors aux moyens à mettre en œuvre et choisissent ensemble les méthodes les plus pertinentes, qu’ils appliquent chaque semaine dans leurs classes respectives. Les évaluations nationales du milieu de l’année permettent de vérifier l’amélioration des résultats de chaque élève. Cette année, notre priorité était de remonter le niveau côté vocabulaire. Après quelques mois, les résultats sont très encourageants. Ce travail collaboratif est aussi mené entre les différents niveaux de l’école, y compris avec la maternelle, et avec le collège.
Vous avez à cœur de favoriser l’ouverture et la réussite des élèves de ces écoles en REP +. Comment ?
Pour continuer à innover et à diffuser les bonnes pratiques pédagogiques, nous regardons notamment ce qui se fait à l’étranger, en particulier au Québec. Là-bas, non seulement les écoles ont chacune une identité propre mais elles appliquent aussi une philosophie qui responsabilise, valorise et respecte l’enfant. Les élèves les plus difficiles, par exemple, peuvent demander à sortir de la classe quelques minutes pour aller se défouler en jouant au ballon ou aux raquettes. C’est exceptionnel ! Nous souhaitons faire de même. Nous travaillons beaucoup avec les enfants autour de l’écologie, de la biodiversité, de la poésie… Nous avons également défini avec les enseignants quatre valeurs qui nous rassemblent et que nous cherchons à inculquer aux élèves au quotidien : le respect, l’entraide, la curiosité et le goût de l’effort. L’application de ces valeurs a un impact sur le comportement des enfants et favorise leur réussite en leur donnant confiance en eux, en leurs capacités. Tous ces changements, ces évolutions plutôt, créent une certaine émulsion et les résultats sont là ! Cela se concrétise en particulier par l’amélioration du climat scolaire de notre école : des élèves en réussite, plus heureux, et des professeurs qui gagnent en développement professionnel.
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