Aménagement des espaces éducatifs
Classe de demain

Éducation

Les cours de récréation font leur « gender revolution »

15 février 2021
Nouvelles Classes

Partout en France, de nouveaux aménagements fleurissent dans les établissements scolaires pour faire de la cour de récréation, un lieu qui favorise la mixité et l’égalité de genre dans l’appropriation de l’espace.

Lieu pour tous, l’espace public est pourtant un endroit où s’expriment majoritairement aujourd’hui, les inégalités de genre. A titre d’exemple, 95% des personnes qui utilisent les city stades sont des hommes selon le centre Hubertine Auclert. Or, cette monopolisation spatiale par les hommes puiserait son origine dès nos cours de récréation. C’est pourquoi, de plus en plus d’établissements scolaires se chargent de rectifier le tir en aménageant des cours de récréation non genrées, plus mixtes et plus égalitaires.

A l’école, des cours de récréation encore inégalitaires

Des inégalités dans la cour de récréation ? Selon la chercheuse et géographe Edith Maruéjouls, la pratique du football en serait en effet, le principal vecteur. Occupant parfois près de 80% de l’espace, le football place les garçons au centre du terrain et relègue les filles en périphérie qui n’osent traverser le terrain au risque de se prendre un ballon.

Or, cette délimitation spatiale classique est pourtant lourde de conséquences dans l’éducation des enfants. Elle enseigne notamment aux garçons que l’espace public leur est dévolu et qu’ils ont le droit de se l’approprier. Aux filles, elle leur apprend à l’inverse qu’il est normal pour elles d’être reléguées aux marges de la cour. Plus encore, elle favoriserait la mobilité des garçons et l’immobilisme des jeunes filles.  Cette inégalité est d’ailleurs vivement ressentie chez ces jeunes filles, qui sont 45% d’après une étude de l’Unicef à se sentir moins favorisées que les garçons.

Des aménagements d’un nouveau genre

C’est pourquoi depuis quelques années, les cours de récréation revoient progressivement leur copie en matière d’aménagement et évoluent de plus en plus vers des usages non genrés. En effet, les établissements réaménagent leur cour pour redistribuer plus équitablement aux filles les mètres carrés monopolisés par les garçons. Célia Ferrer, designer sociale conseille dans ce sens aux élus d’équiper l’école d’« un mobilier modulable, que les enfants peuvent s’approprier. Des blocs de hauteurs différentes qui se déplacent, peuvent être escaladés, permettent de s’asseoir, de s’isoler, de surplomber, de sauter… Des choses très abstraites et simples ».

De nombreuses villes font déjà figure de bonne élève en la matière. C’est notamment le cas à Lyon où en 2013, selon les écoles primaires de nouveaux marquages, une cabane, un petit jardin, des tours d’arbres en bois, une pelouse synthétique, ont notamment été installés. La ville de Rennes a également misé sur l’installation d’activités périscolaires multiples pour ses écoles : filets de volley, paniers de basket, toboggan, lignes au sol pour des jeux. L’école Michel-de-Montaigne dans les Yvelines n’est pas en reste. A la place du bitume, une pelouse synthétique parsemée de balançoires et tourniquets redistribue l’espace et cantonne plus strictement l’exercice du football. Le bilan s’annonce des plus positifs selon Florent Bourcier, responsable éducation loisirs pour la ville de Rennes. « Aujourd'hui on remarque que la cour est vraiment mélangée : il n'y a pas les filles d'un côté, les garçons de l'autre... On voit bien que les enfants utilisent toute la cour : les couloirs de course, les terrains de basket, les enfants aiment l'espace naturel avec les enrochements. »

La pédagogie : moteur du changement

A eux seuls, ces nouveaux aménagements ne sont parfois pas suffisants pour garantir l’égalité d’accès aux élèves. Nombre d’instituteurs et institutrices envisagent différemment l’espace de la cour pour l’investir de nouvelles pratiques pédagogiques et casser ainsi la reproduction des stéréotypes de genre. Plusieurs initiatives en témoignent. Exemple : Samia, une enseignante raconte qu’elle: «  joue avec les garçons pour leur montrer qu’une fille est capable de jouer au foot […] du coup, quand je me suis mise à jouer, les filles m’ont suivie. » A l’inverse, Samia a également à cœur d’apprendre aux garçons de faire de la corde à sauter. Le but de la mission étant simple à terme : parvenir à faire jouer filles et garçons ensemble pour décloisonner les pratiques.

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