Educatec 2019 : la classe modulable au cœur de toutes les réflexions

Selon un rapport de l’Institute for the future, 85 % des métiers de 2030 n’ont pas encore été inventés. Alors comment former les élèves d’aujourd’hui ? Quels savoirs valoriser ? Comment les transmettre dans de bonnes conditions ? Ces questions traversent aussi bien les établissements scolaires que les classes supérieures. Les 20 et 21 novembre 2019, enseignants, chercheurs et start-ups, se sont réunis pour échanger sur les nouvelles tendances pédagogiques au salon Educatec. Parmi les solutions concrètes évoquées, on retrouve la classe modulable, un aménagement sur mesure au service des besoins spécifiques de chaque élève. Explications.

Plongée au cœur d’un enseignement supérieur… flexible

Le 20 novembre, 12h. Au salon Educatec, une table ronde réunit plusieurs experts de l’enseignement supérieur et un architecte. Le sujet : les nouveaux environnements d’apprentissage et leurs enjeux. « Notre objectif est de penser nos futures classes sans tomber dans la gadgétisation », affirme Marie-Cécile Daniel vice-présidente formation « tout au long de la vie » au sein de la Sorbonne Université. Sur les trente sites de l’université, plusieurs ont été rénovés ces dernières années dont le site historique établi dans le quartier de Jussieu à Paris. Le bien-être de l’élève y a été étudié comme pierre angulaire l’aménagement. « Les usages changent, chaque espace doit pouvoir être utilisé différemment en fonction des moments de la journée et des activités des élèves. », confirme la vice-présidente.

Un constat partagé par Emmanuelle Dubrana-Lety en charge du projet « Campus 2022 » de SciencePo Paris. L’idée : ouvrir un nouveau campus au 1 place Saint-Thomas d’Aquin à Paris dans l’ancien hôtel de l’Artillerie, à quelques pas du bâtiment principal rue de l’université. Le coût total du projet est estimé à 200 millions d’euros entre l’achat des locaux, leur rénovation et l’équipement. Pour ce chantier d’envergure, Emmanuelle Dubrana-Lety explique que la conception d’espaces flexibles s’est imposée d’elle-même : « La modularité n’amène pas nécessairement un surcoût, il s’agit plutôt de mieux flécher l’investissement vers les besoins et la mise en œuvre de pédagogies innovantes. » De son côté Marc Seifert, architecte associé de l’agence A26 fait remarquer que cette volonté de concentrer les lieux d’apprentissage n’est pas nouvelle : « Les locaux des établissements sont de plus en plus choisis au sein d’un même périmètre. Leur aménagement est pensé comme une unité afin d’exprimer une entité commune et de mutualiser les lieux d’apprentissage. »

Christine Fiasson, adjointe au délégué académique au numérique du rectorat de Versailles, ajoute que la conception de classes flexibles et le déploiement du plan numérique au niveau national sont intimement liés : « Une classe flexible va favoriser le travail en petits groupes ou en binôme. Or, le numérique peut soutenir cette dynamique avec notamment l’intégration de tablettes numériques au sein de chaque table disposée en îlot dans la classe. »

Et si l’aménagement était un jeu d’enfants ?

Autre rendez-vous du salon : le Carrefour de l’innovation pédagogique, un espace de 120 m2 dédié aux nouveaux modes d’aménagement de classe. Aurélia Onyzsko, enseignante, et Marjorie Pouillion, formatrice Canopé 57, toutes deux engagées dans une réflexion sur l’aménagement des espaces scolaires sont ainsi venues à la rencontre d’enseignants du primaire et du secondaire en quête de conseils pour partager leur expérience.

Au programme de l’atelier ? Une présentation de la classe d’Aurélia passée d’une disposition des tables en « autobus » à une gestion de l’espace par zones pour mieux répondre aux besoins des élèves. Elle a ainsi instauré une nouvelle façon de travailler par un travail dirigé en demi-classe, des espaces dédiés avec notamment un coin calme ou encore un espace de regroupement. « Quand on compare l’organisation d’une classe de maternelle à celle d’une classe primaire, il y a un gouffre pour les élèves. Je me suis ainsi inspirée de la maternelle pour réinstaurer des expériences plus proches du vécu passé des enfants. Les enfants s’adaptent plus facilement, ils rentrent plus vite dans les apprentissages et le fonctionnement de la classe. »

Captivée, l’audience se lance alors dans l’atelier. Le but du jeu ? A l’aide d’une feuille plastifiée et de cartes de couleur, les participants réfléchissent par équipe à l’aménagement d’un espace flexible en fonction de leurs objectifs pédagogiques et de contraintes données. Par exemple : aménager une classe avec comme matériel des casques audio, un vidéoprojecteur tout en favorisant la notion de partage.

Résultat ? Un premier groupe prévoit un îlot central pour installer le vidéoprojecteur afin que les élèves s’approprient l’expérience. Un second, imagine sur un mur sans fenêtre un tableau géant sur lequel les élèves pourront écrire leur leçon et s’exprimer …

L’atelier délie les langues et très vite les participants partagent leur expérience : manque de moyens financiers, crainte d’être mal vu de la direction de l’établissement ou mal compris par les parents d’élèves. « Vous ne vous lancerez pas d’un coup, souligne Marjorie. L’aménagement flexible se construit progressivement en impliquant les élèves afin qu’ils s’approprient au mieux ce nouvel espace. » De même l’enseignante revient sur un autre frein souvent évoqué lors de ses présentations : « L’aménagement d’une classe flexible dans le secondaire est souvent perçu comme plus difficile qu’une classe primaire car les élèves n’ont pas de salle fixe. Cela ne doit pas vous arrêter ! Rien ne vous empêche d’engager une réflexion avec plusieurs de vos collègues pour construire un projet global en accord avec le déploiement du plan numérique de l’établissement. » Au final, le réaménagement d’une classe en mode flexible se traduit par trois questions : De quoi ont besoin vos élèves ? Quelles sont vos contraintes ? Mais surtout… quelles sont vos envies ?